Les échecs sont plutôt rares. Mais bien s'informer est indispensable

C'est entendu: l'intérêt de la franchise est d'offrir un filet de sécurité pour les néophytes. Attention, toutefois: ce système ne constitue tout de même pas une assurance tous risques! Si les cas d'échec sont rares, les déconvenues existent. Chaque année, plus d'une centaine d'affaires entre franchiseurs et franchisés sont portées devant les tribunaux. Pour éviter les déceptions et les litiges, le candidat a intérêt à bien se renseigner avant de franchir le pas. 

Première précaution: vérifier la validité du concept. «Il faut que l'idée du franchiseur apporte une valeur ajoutée inimitable par rapport à la concurrence, rappelle Gérard Aubin, directeur conseil du cabinet de consultants en franchise Cegos-PR3. Inutile de choisir une pâle copie de Caroll ou d'Ibis, autant prendre l'original!» La meilleure garantie: s'assurer que le franchiseur est leader dans son secteur et a de bonnes chances de le rester. Un concept original, c'est justement ce qui a manqué à Glup's. Cette franchise de bonbons a été créée en 1993 sur une idée remarquée aux Etats-Unis: ouvrir des confiseries en libre-service. L'idée était bonne, mais un peu trop simple... et surtout facilement imitable. Résultat: une myriade de concurrents sont arrivés sur le marché, qui s'est effondré. Rachetée il y a quatre ans par son ancien fournisseur, l'enseigne regroupe aujourd'hui 60 magasins et réalise un chiffre d'affaires de 100 millions de francs. «Comme le concept n'est pas discriminant, nous avons abandonné le système de la franchise pour celui, plus souple, de la concession, explique Jean-Pierre Guimard, responsable du développement. Nos concessionnaires ne versent pas de redevance sur leur chiffre d'affaires, mais s'approvisionnent exclusivement chez nous.» Le «concédant» est également plus vigilant sur le choix des emplacements et le recrutement de ses partenaires. «Pour faciliter l'achat d'impulsion, nous mettons l'accent sur l'animation des magasins et la promotion», renchérit Jean-Pierre Guimard, qui ajoute qu'il n'est pas inquiet pour l'avenir: «Le bonbon est un produit intemporel.» 

La deuxième précaution consiste justement à s'assurer que le concept est durable. «Gare aux effets de mode et aux idées vieillissantes», prévient Jean Samper, directeur du cabinet de conseil en franchise AC Développement. Ainsi, Phildar, le plus grand réseau français avec plus d'un millier de points de vente, a su faire évoluer son concept, de la vente de fils à tricoter au prêt-à-porter féminin. «Aujourd'hui, nous agrandissons nos magasins pour passer à une surface de vente d'environ 100 mètres carrés, dont un tiers seulement sera consacré au fil à tricoter», détaille Alain Boijeot, qui prévoit pour l'an prochain, outre une trentaine de créations, la restructuration d'une cinquantaine de boutiques. 

Vérifier la qualité du franchiseur. «Le risque de tomber sur un escroc est pratiquement nul, car la franchise est aujourd'hui très encadrée grâce à la loi Doubin et aux efforts des professionnels du secteur», relativise Jean Samper. Assurez-vous toutefois que le franchiseur, même dans le cas d'un jeune réseau, présente des garanties suffisantes pour vous lancer dans l'aventure. «Signer un contrat de franchise consiste à essayer de réitérer le succès du franchiseur, rappelle Olivier Deschamps, avocat associé au cabinet DM & D. Le futur franchisé doit collecter le maximum d'informations et analyser en profondeur le document d'information précontractuel avec l'aide d'un avocat et d'un expert-comptable.» Le candidat à la franchise peut également s'informer auprès de la Fédération française de la franchise (FFF), à laquelle adhèrent une centaine de franchiseurs passés au crible avant d'être acceptés. La plupart des banques collectent aussi des informations sur les réseaux de franchise. Il ne faut pas non plus hésiter à aller enquêter sur le terrain. L'idéal est de visiter au moins trois magasins du réseau, de taille et de maturité différentes. 

Malgré toutes ces précautions, il reste encore un écueil important, mais qui n'est pas forcément celui auquel on pense de prime abord... «Le principal ennemi du franchisé, c'est lui-même, affirme François Maire, coordinateur du collège des experts de la FFF. Il doit être bien conscient de ce à quoi il s'engage, et ne pas trop rêver!» Inutile de croire qu'il suffit d'intégrer un réseau pour que les affaires marchent. Chez Speed Rabbit Pizza, le franchisé idéal est bien sûr un bon commerçant, mais surtout un débrouillard. «Le franchisé est tout le temps sur la brèche. Il doit être capable d'accueillir les clients, de gérer les réclamations, de manager ses équipes, voire de s'occuper d'une Mobylette en panne», déclare Pierre Suquet, responsable du réseau. «Le franchisé doit aussi avoir les pieds sur terre: il faut comparer ce qu'il a envie de faire avec les fonds dont il dispose. Inutile d'espérer ouvrir un hôtel trois étoiles avec 500 000 F d'apport personnel», renchérit Chantal Zimmer, déléguée générale de la FFF. Intégrer un réseau est plus qu'un choix professionnel: c'est un engagement financier personnel et familial important. «Le candidat à la franchise doit bien expliquer à son entourage les contraintes de la création d'un commerce en franchise, comme les horaires soutenus ou le lourd investissement financier, souligne Jean Samper. Il doit également être sincère et transparent avec son franchiseur, son banquier, son avocat et son comptable. Le plus stupide: mentir sur son apport personnel en cachant à ses partenaires que la moitié des fonds provient de la belle-mère qu'il faudra rembourser dans deux ans!» La réussite est aussi une question de... franchise! 

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